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Les amants modèles - 1.

— Vous avez une réservation ? demanda la jeune femme de la réception de l’hôtel.

— Oui, au nom de Joachim. Et je vous dois plus que pour deux personnes : quelqu’un va nous rejoindre…

Je n’ai pas pipé. J’ai senti mon cœur battre un peu plus vite. J’étais curieuse. Pas inquiète. Juste curieuse. Je me demandais à qui mon amant avait proposé de « partager notre moment intime ».


Il m’avait parlé de son amour pour le candaulisme. Je suis certaine qu’il ne pratiquerait pas cela avec son épouse. Mais comme moi, j’étais juste sa maîtresse, tout était envisageable.

Je tenais mon fourre-tout pétrole bien serré contre moi. Je me sentais un peu gauche quand je suis montée jusqu’au deuxième étage d’une démarche pourtant assurée. Chambre Eros, ma préférée…

Celle qui fut le témoin de nos premiers ébats. Bleue : les rideaux, la peinture murale, le couvre-lit, les petits fauteuils. Je ne dirais pas que c’était une débauche de cette couleur. D’abord parce que c’est celle que je préfère. Ensuite parce que le bleu n’est en rien criard. Juste soutenu. Tendre et intime.

Bref : je suis montée calmement en me disant : « tu n’as rien à craindre. Joachim te connait. Tu lui as donné ton accord pour une séance photo. Il doit s’agir de cela. Respire un bon coup. Le ou la troisième ne va sans doute pas arriver tout de suite. Tu as un peu le temps de t’habituer à l’idée. »

Ah, cette idée… Joachim me l’avait soumise un bon moment auparavant. Et très heureuse de « jouer à cela », j’avais accepté sans hésiter. Il voulait nous prendre en photo. Pas moi seule, non : nous deux. Ce n’était pas une démarche genre : « je veux vous regarder sous toutes les coutures et immortaliser votre intimité, ce que vous vous efforcez de cacher ». Non. Plutôt « je voudrais vous troubler, que vous soyez un peu mal à l’aise. Nous nous arrêterons dès que vous me le demanderez ».

Sauf que cette fois-là, je n’avais rien demandé et nous ne nous sommes pas arrêtés ! Je me sentais belle dans l’objectif de son petit appareil photo. Il était très délicat, savait exactement ce qu’il voulait comme clichés. Et quand il me les a envoyés, j’étais heureuse et fière d’avoir joué au modèle. Ce que je préférais, c’était celle qu’il avait prise dans un miroir, lui sur les genoux, m’empoignant un sein. On était toujours habillés. Je me souvenais de comment il avait fait pour nous photographier et j’étais satisfaite de l’effet que cela donnait. Un mâle un peu dominateur qui me « fait l’honneur » de jouer avec mes seins de cette manière.

Je sais que cela lui plait et je pense que c’est parce qu’il se sent puissant. Il est conscient du fait que je me laisserai faire, que je ne jouerai pas les effarouchées, que je profiterai vraiment du moment. Je suppose qu’il apprécie d’être mon « pourvoyeur de plaisir ».

Même si je savais qu’un peu plus tard, nous ne serions plus seuls, je restais maîtresse de moi.

Il a ôté le couvre-lit bleu aux motifs mauves du lit. A sorti de son sac en coton écru une bouteille de vin qu’il a débouchée et nous en a servi un gobelet à chacun. Il a extirpé ensuite un vrai verre pour son invité et l’a déposé sur la petite table près des fauteuils. Puis, il a pris une boîte contenant du raisin blanc, l’a ouverte et l’a déposée sur le lit. Il m’a dit qu’il avait donné rendez-vous à midi moins le quart et il a déposé son petit appareil photo sur la table, à côté du verre…

Jusque là, il évitait de me dire qui allait nous rejoindre. Homme, femme ? Cela avait-il de l’importance, dans le fond. Je suis certaine que si je lui avais posé la question, il m’aurait répondu ça : « ça a de l’importance ? »

— Hier, vous m’avez donné carte blanche… Alors, je m’en suis servi !

Impossible de savoir si ce serait un ou une photographe. Je pensais : « je suis certaine que c’est une femme » parce que je le voyais mal demander à un homme de se contenter de mitrailler…

Je le regardais. On était pratiquement silencieux l’un comme l’autre. Je me rappelle lui avoir dit que je parlerais moins ce jour-là que les autres ! Il s’est approché des tentures bleues et les a ouvertes pour que la pièce soit plus claire.

J’étais dos à la porte, comme à mon habitude, allongée sur le lit sans mes chaussures. Il m’a rejointe après avoir retiré les siennes.

Nous avons entendu trois petits coups très discrets. Il a dit « entrez » et s’est levé parce qu’il avait, dans un réflexe, fermé la porte à clé juste après notre arrivée…

Elle est entrée…

J’avais donc bien anticipé que ce serait une femme. Curieusement, elle m’a eu l’air plus austère que moi, moins… joyeuse. Peut-être était-elle gênée ? Je pense que si j’avais été à sa place, je l’aurais été. Je me sentais rassurée. Je me disais qu’elle n’était pas une de ces jeunettes aguicheuse et un peu fofolle. Plutôt quelqu’un de posé. Elle ne devait pas être coincée sinon, avec les propositions un peu fantasques de Joachim, elle se serait déjà encourue. Elle n’avait pas mes formes, semblait aimer les collants résille autant que moi. Elle avait des cheveux sombres dans lesquels je cherchais des fils d’argent que je ne trouvai pas.

Après m’avoir été présentée (B. – E., E. – B.), s’être débarrassée de son manteau et avoir déposé son foulard sur le dos d’un des petits fauteuils, elle s’est assise tranquillement sur le lit, de biais, en me tournant pratiquement le dos. Pas qu’elle ne veuille pas me regarder Simplement, c’était l’endroit le plus confortable pour s’installer. Joachim s’est levé, lui a tendu le verre de vin à moitié rempli et la boîte de raisins qui, déclara-t-elle, étaient croquants et sucrés.

Moi, je picorais du bout des lèvres. J’avais envie que les choses commencent. J’étais impatiente, curieuse et anxieuse à la fois.

Joachim a saisi l’appareil-photo et l’a tendu à Elisa. Celle-ci a ôté ses chaussures… aussi plates que les miennes et est devenue transparente…

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