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Papier vergé vs feuillet origami fleuri - correspondance 1

Eulalie, Noël, une histoire sulfureuse... Cela commence par une correspondance.


10 mars – Noël à Eulalie


Mots imposés : colibri – violoncelle – azur

Noël venait d’envoyer à Eulalie les trois mots qu’elle aurait à intégrer dans un texte, une courte histoire, un poème, peu lui importait.

Le « petit jeu » durait depuis un bon mois. Il avait fait la connaissance de la jeune fille sur un site de défis littéraires. Mais après quelques productions postées sur ce dernier et un court échange de mails persos, ils avaient décidé, de commun accord, de s’envoyer leurs écrits par la poste…

Étrange, tout de même, à l’heure où la virtualité est si présente dans notre vie quotidienne. Noël aimait le parfum du papier. Eulalie, pour lui faire plaisir, lui avait emboîté le pas : elle répondait aux défis soumis par Noël sur du papier origami, celui dont on se sert pour réaliser des pliages. Son choix s’était porté sur des carrés de 15 cm de côté, fleuris, dans les tons rose et bleu. Le papier utilisé quant à lui par Noël, c’était du « vergé », dont les nervures l’obligeaient à écrire de manière bien horizontale…

Chacun s’était donc fait une idée des valeurs de son correspondant, de ce à quoi il ressemblait. L’homme imaginait Eulalie un peu fofolle, plutôt sportive, avec des cheveux courts, blonds (elle avait juste parlé de la couleur de ceux- ci) mais avec un soupçon de romantisme, tout de même. La jeune femme voyait Noël comme quelqu’un de très correct, vieille France, assez âgé que pour être son père, très soucieux des convenances, poli, bien mis.


13 mars – Eulalie à Noël


« Pauvre colibri, encagé…

Tu rêves de ciel azur et

Ton chant rappelle

Un violoncelle »

Noël, en découvrant les quatre petits vers d’Eulalie, sourit… Si elle avait pu n’en écrire que deux, c’est ce qu’elle aurait fait. Il admirait la manière avec laquelle elle était capable de faire des liens entre les mots, qui, de prime abord, n’avaient rien à voir l’un avec l’autre… Si la jeune femme lui avait envoyé ce défi précis, il lui aurait répondu en trois missives, imaginant un paragraphe d’une dizaine de lignes pour chaque mot. Peut- être les paragraphes en question auraient- ils un rapport entre eux, mais ce n’était même pas certain…

Mots imposés : bicyclette – réverbère – Chinois

Surtout, ne pas verser dans la brièveté de ce qu’Eulalie lui envoyait. Il se mit donc à réfléchir au champ lexical de chaque mot proposé.

Bicyclette : parler des roues qui tournent ensemble, du chemin qu’elle est à parcourir, de ceux qu’elle a déjà empruntés (certains boueux, d’autres très secs), de ceux trop périlleux ou trop ardus qui font abandonner la promenade.

Réverbère : construire une histoire autour de la lumière qu’il diffusait autrefois, des scènes qu’il avait éclairées, des couples d’amoureux qui s’étaient peut- être appuyés contre lui pour des baisers passionnés.

Chinois : parlait- on d’un Chinois de Chine ? Parce qu’un chinois, c’est aussi un ustensile de cuisine. C’est en outre, un mot qu’on emploie pour parler de quelque chose d’un peu tordu… Non ? Dans le sens « chinoiseries »…

Bref, il avait à réfléchir à tout cela : mettre les mots dans sa tête, les laisser se trouver une route imaginaire et demain matin, au lever, il aurait sans doute trois petites histoires à envoyer à Eulalie. Dans le cas contraire, et comme il le faisait habituellement, il enverrait ses productions l’une après l’autre, trois jours distincts… La jeune femme ne lui avait jamais dit qu’il prenait trop de temps et lui, il aimait écrire et se torturer les neurones pour lui envoyer de jolies choses…

…..

La correspondance établie entre Eulalie et Noël était donc tout ce qu’il y a de plus… littéraire. Jamais ils ne parlaient de leur vie personnelle, ou intime, de leur travail, de leurs goûts en matière de films, de musique… Non, que de l’écriture.

Au bout de quelques temps, cependant, Noël, plus entreprenant qu’Eulalie, insérait des petits sous- entendus dans ses envois. Un jour, par exemple, au lieu de lui répondre par un texte en prose, il lui fit parvenir un acrostiche. Ce qu’il y avait à lire grâce à la première lettre de chaque ligne, c’était : quand nous verrons- nous ? Dans la réponse qu’il reçut, il n’y avait aucune réaction d’Eulalie… Sans doute n’avait- elle pas remarqué le « petit jeu »… Il lui renvoya donc autre chose en « donnant un petit coup de pouce ».

« Quel est donc ce charmant message

Unique en son genre, s’il est sage

A mesure que se lit cet hommage

Niant les affronts et les outrages

Dans ces quelques lignes, cherchez l’initiale

En vous concentrant, distinguez sans mal

Notes et mots en fusion totale

Vers épars, minutes vespérales

Riez donc, douce demoiselle

A jamais je compte vous demeurer fidèle

Ici- bas, ma virtuelle mais réelle »


15 avril – Eulalie à Noël


En réponse à votre acrostiche : Orly, le 12/05 à 17h08. Oui ?


19 avril – Noël à Eulalie


Chère vous,


Avant de nous rencontrer réellement, permettez- moi tout d’abord de vous remercier pour ce moment que vous avez décidé de me consacrer. Je suis très sensible au fait que vous ayez accepté mon invitation.

Habitant à quelques pas de la Seine, je me propose de vous faire découvrir ses quais, ainsi qu’un petit restaurant qui charmera, je l’espère, vos papilles curieuses.

Bien sûr, vous logerez chez moi. A vite. Je vous embrasse.


Noël.



A suivre... : Eulalie, Noël, une histoire sulfureuse... La correspondance se poursuit avec un projet de rencontre à Paris. Chacun a des attentes précises sur la manière dont les choses se passeront.

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