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La preuve - Ariane (3).

Je suis profondément troublée.

Lorsqu’il est parti sans dire un mot, je me suis précipitée vers mon ordinateur, mais, avec la tempête, pas de réseau ! Idem sur mon portable. Je n’ai donc aucun moyen de savoir si cet homme qui m’attire comme par permis est bien ce Thomas, maître escrimeur. Il m’apparaît dangereux à deux titres : c’est peut-être un psychopathe et j’ai envie de lui. Une équation impossible.

Lorsqu’il est revenu, ma surprise a été telle que j’en ai fait tomber cette saloperie de code. J’ai inventé n’importe quoi, le temps de trouver ma bombe au poivre, bien décidée à défendre chèrement ma peau au cas où. Et puis je l’ai entendu rire. Un déséquilibré ne se comporterait pas comme ça, si ?

Je ne sais pas pourquoi j’ai agi ainsi lorsque je lui ai murmuré à l’oreille, cela a été plus fort que moi. Le voir vulnérable, sans barrières, m’a littéralement prise aux tripes. J’ai adoré ça. Il a l’art de rire et ce n’est pas donné à tous les hommes. J’ai senti qu’il y avait longtemps que cela ne lui était pas arrivé et j’ai été heureuse d’en être la cause. Sa voix a quelque chose de magnétique. Lorsque son regard m’a happée, son désir de me déshabiller m’a embrasée et j’ai résisté vaillamment pour ne pas tomber à genoux et le dévêtir à mon tour, me jeter sur lui et lui mordiller cette bouche, certaine d’y trouver un goût d’interdit. Je me suis reprise et lui ai montré ma petite bombe.

Et je ne sais plus. Il semble sidéré.

— Vous ne me reconnaissez donc pas du tout ?

— Non. Prouvez-moi que vous êtes bien Thomas Bastin.

Il digère la situation et désigne la porte.

— Mon portefeuille est dans mon imper que j’ai laissé dans la voiture.

— Allez le chercher.

— Il pleut à verse, proteste-t-il.

— Pas de papiers, pas de dépannage.

Je fais ma froide, mais je suis bouillante parce que je suis prête à lui donner toutes les circonstances atténuantes du monde tant son charisme me trouble et que j’aspire à sentir ses mains sur moi. Partout. Surtout là, et ici et aussi là et puis ici encore.

Il lève ses beaux yeux au ciel, soupire son mécontentement puis se résigne à affronter à nouveau les intempéries. Avant de sortir, il se penche vers moi, très près de ma bouche. Je tiens le coup, je ne sais pas comment.

— Vous aurez l’air maligne quand je reviendrai avec mon passeport. Je me régale d’avance de vos excuses !

— La preuve, s’il vous plaît, dis-je, imperturbable.

J’en suis très loin. Il y a un moment qu’un homme m’avait mise dans cet état et je suis partagée : j’ai terriblement envie de lui faire confiance et d’aller le titiller pour savoir jusqu’où nous pourrions nous perdre, et dans le même temps, je dois me méfier. Je coupe la poire en deux : s’il est bien Thomas Bastin, je me fais pardonner et je l’amène à son hôtel, il m’invite à boire un café dans sa chambre et se jette sur moi pour me montrer qu’il n’est pas rancunier. Si c’est un imposteur, je l’asperge de poivre, je l’assomme avec le code et je le ficelle avant d’aller chercher la police qui est à dix pas d’ici.

Oui. C’est bien comme plan. Il tient la route.

Pourvu que la première moitié de la poire soit la bonne. Parce que, mince, cet homme est un fantasme sur pattes. Il me donne des envies de fille dévergondée, des caprices d’allumeuse, des fringales d’affamée sexuelle. Je traînerais ma langue partout sur lui, l’amènerais à tordre les draps, à se cambrer sous ma bouche, à…

Bon, où est le seau d’eau froide, déjà ?

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